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La publicité au Sénégal

Souleymane Dia, régisseur général à la maison de production RVB

"La publicité de qualité coûte chère !"

Les publicités et spots sur différentes sortes de produits prolifèrent sur la multitude de chaînes de télévision sénégalaises. Souleymane Dia, employé à RVB, une grande maison de production, nous parle du milieu de la communication, plus particulièrement de la publicité qui fait le thème de notre interview.

Que signifie RVB ?
Rouge, Vert, Bleu. Notre maison de production a choisi ces trois couleurs car elles représentent l’image, elles sont essentielles à celle-ci. Sans l’une de ces couleurs, l’image n’est plus de qualité ou bien elle n’existe tout simplement pas. Chacune de ces couleurs a un rôle important à y jouer. Je trouve que cette appellation répond parfaitement au profil de notre maison qui se veut être une maison de qualité.

Qu’est-ce que la publicité ?
Question fort intéressante ! On parle beaucoup de la publicité sans pour autant pouvoir la définir. Pour moi, la définition est très simple : c’est le fait d’inciter un public à acheter un produit en exerçant une action psychologique sur lui. Cette action sert uniquement à des fins commerciales.

On entend souvent parler de spot, est-ce la même chose qu’une publicité ?
Oui, on peut utiliser le terme spot pour parler de publicité à la seule différence que le spot est un bref message publicitaire.

Comment réalise-t-on une publicité ?
Pour réaliser une publicité, il faut beaucoup de moyens. C’est la maison de production qui s’occupe de la réalisation des idées des demandeurs ou des agences de communication qui servent d’intermédiaires. Tout d’abord, on commence par un « brainstorming », c’est-à-dire que chaque membre de la maison de production émet des idées pour la publicité. On discute sur le nombre de personnes à recruter, les comédiens, la durée et le lieu du tournage…Ensuite, après avoir estimé les frais et les dépenses à effectuer, on fixe un prix au demandeur qui l’étudiera avant l’entame du tournage. Après le repérage du lieu de la publicité et le casting pour les comédiens, on procède enfin au tournage de la publicité.
Cependant, il faut noter que la maison de production ne s’occupe que du tournage, de la concrétisation des idées émises par les agences de communication. Celles-ci servent toujours d’intermédiaires entre les demandeurs et les maisons de production.

Est- ce que la publicité coûte chère ?
La publicité ne coûte pas chère mais celle de qualité, oui ! Cependant, au Sénégal, la qualité importe peu pour les clients. S’ils peuvent l’avoir à moindre coût, c’est tant mieux sinon c’est tant pis. Toujours parmi les clients, il y en a qui veulent avoir de la qualité sans y mettre le prix. Quand on leur fait une estimation de la somme à débourser, c’est à peine s’ils ne frôlent pas la crise cardiaque. Ils ont toujours à redire sur le prix qu’ils trouvent trop exorbitant et s’il n’y a pas d’entente sur un prix, les demandeurs préfèrent se passer de nos services pour s’associer à une autre maison de production qui leur proposera un prix abordable mais une publicité de moindre qualité. Les personnes ne savent pas que pour faire de bons spots publicitaires il faut des logiciels hi-tech pour faire les Effets 3 D, pour avoir une image de qualité en HDV (Vidéo Haute Définition). Pour faire de la publicité de qualité, il faut du matériel sophistiqué et il coûte cher. C’est ce qui fait la différence dans notre maison de production, nous faisons de la qualité et nos fidèles clients le savent. Une pub faite par RVB se reconnaît tout de suite, tant par la qualité de l’image que par le contenu de la pub. Mais bon…peu de gens se soucient de la qualité d’une pub. Avec la prolifération des maisons de production, et la concurrence qui sied, on peut avoir la pub que l’on veut même si la qualité n’y est pas.

Est-ce que les maisons de production gagnent beaucoup d’argent avec les publicités ?
Avant, la pub rapportait beaucoup d’argent parce que les maisons de production n’étaient pas nombreuses sur le marché. Aujourd’hui, il devient de plus en plus difficile de se faire de l’argent dans les pubs : le marché est devenu étroit et la concurrence rude. Depuis la crise qui s’est produite en Côte d’Ivoire, une partie des maisons de productions et des agences de communication de ce pays est venue s’établir à Dakar pour profiter du marché sénégalais. C’est pourquoi certaines grandes maisons de production comme PANAFCOM, qui n’ont pas pu supporter la concurrence, ont fait faillite. Désormais, tout le monde se dit réalisateur ou producteur de publicité comme si ce métier est un jeu d’enfant et ne demande pas du sérieux. Pour ma part, je crois qu’il devrait y avoir une loi relative aux maisons de production pour enfin réguler le marché.

Que pensez-vous des pubs qui passent tous les jours à la télé, avec des comédiens, des danseurs…des pubs plus ou moins folkloriques ?
Je ne suis pas adepte de ce genre de spots, je les trouve dépourvues de sens et n’ont aucun impact sur le public qui ne voit plus le produit proposé mais les personnes qui se trémoussent au son du « mbalakh ». Je trouve que les personnes qui font ce genre de pubs se moquent vraiment des téléspectateurs qu’elles croient incapables de voir plus loin que l’aspect folklorique de la chose. En effet, voir un « Sanex » se trémousser est plus intéressant que de regarder le produit proposé. Et cela nous ramène à la question de la qualité évoquée tout à l’heure. Une pub doit mettre en exergue le produit et non les personnages, aussi célèbres soient-ils. Sur les chaînes de télé occidentales, par exemple, les pubs sont tellement accrocheurs que tu as tout de suite envie d’acheter le produit présenté. Il n’est pas nécessaire d’insister sur l’aspect folklorique, ni de mettre une star au devant de la scène pour faire une bonne pub. Même avec des animations (c’est-à-dire sans aucun acteur), des images virtuelles, une pub peut cartonner.

Est-ce qu’il faut énormément d’argent pour faire une pub ?
Cela dépend de quel genre de pub on veut. S’il s’agit d’une pub assez compliquée et qui doit mobiliser beaucoup de personnes et de moyens logistiques, c’est sûr que ça va coûter un max de tune. Mais pour vous donner une idée de combien ça doit coûter, une pub de qualité exige au minimum 1 000 000 de Fcfa. Bah oui ! Il ne s’agit pas du travail d’une seule personne, il y a toute une équipe, tout un staff derrière. C’est comme tourner un film, ça demande beaucoup de moyens. Dans ce milieu, il n’y a pas que les maisons de production, il y a tout un ensemble derrière, parmi lequel figurent les agences de communication qui s’occupent de la campagne publicitaire et les annonceurs (2STV, RTS…).

Quelles sont vos relations avec les agences de communication qui servent d’intermédiaires entre vous et les demandeurs ?
Nous entretenons de plus ou moins bonnes relations même s’il y a dès fois des problèmes. Chacune essaye de défendre au mieux ses intérêts. Pour les pubs, les demandeurs passent toujours par les agences car ce sont elles les intermédiaires. Elles ont leur pourcentage de bénéfices dans toutes les affaires conclues. Je peux même aller jusqu’à dire que ce sont elles qui tirent le plus de bénéfices des pubs qui pourtant, sont entièrement réalisées par nous, les maisons de production. Mais, vous ne verrez jamais après une pub la signature de la maison de production, ce sont toujours celles des agences de communication (Vodoo, Caractères…) qui sont mises en exergue même si c’est la maison qui fait tout le boulot. En plus, certaines agences bernent vraiment les clients. Quand la maison de production fixe un prix pour la pub, les agences y rajoutent un pourcentage qui constituera leur gain, ce qui rend très exorbitant la somme à payer par les demandeurs. Par exemple, si on demande 2 000 000 de Fcfa pour une pub, l’agence demande au client 4 à 5 000 000 de Fcfa pour la réalisation d’un spot. Ainsi, elle aura un bénéfice de 2 à 3 000 000 de francs sans avoir fourni d’efforts. C’est pourquoi, certains clients, l’ayant compris, ont préféré se passer des agences pour faire des affaires directement avec les maisons de production. Je ne nierais pas que ça nous arrange mais on a deux fois plus de travail car celui de l’agence de communication y sera inclus. Mais, ce n’est pas grand-chose.

Quel sera votre mot de la fin ?
Tout d’abord, je tiens à vous remercier de vous être entretenue avec moi sur un sujet très important comme celui de la publicité et j’espère que j’ai pu éclairer votre lanterne sur ce sujet. Je voudrais inciter les personnes qui sont dans le même métier que moi à faire des pubs de qualité, c’est seulement ainsi que l’on peut prétendre conquérir le public et se faire respecter par tous les professionnels du métier. Il faut toujours avoir en tête que c’est la publicité qui vend un produit, qui le valorise. La qualité de nos pubs fait de RVB une maison de référence car c’est la qualité qui fait la différence. Et Dieu merci, on ne se plaint pas car, près de 60% des pubs réalisées au Sénégal sont le fruit de notre dur labeur.

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