Le public perd sa capacité d’analyse
Les gens se trouvent de plus en plus submergés par les vagues d’informations qu’ils reçoivent sans même avoir le temps, ni les moyens de réagir par rapport aux évènements. Ils deviennent ainsi des automates qui subissent l’assaut des évènements récités sans possibilité d’analyse ou de réactions.
Selon l’Ecole de Columbia, à travers Lazarsfeld et Merton, cette surcharge informationnelle peut être assimilée à un dysfonctionnement. Les personnes ne sont pas bien informées et ne peuvent pas ainsi participer activement à la vie publique. Cela est dû à la vitesse et la fréquence auxquelles elles reçoivent les informations. L’information dite « continue » correspond parfois plus au souci de capter l’audience qu’au besoin de dire quelque chose de nouveau. Les médias donnent plus souvent l’impression de subir les « événements » créés par des spécialistes que de découvrir l’information cachée.
En France, c'est le cas avec le suicide d’une jeune
fille dénommée Marjorie
Raymond qui a fait l’actualité pendant un certain temps. Selon les
informations, la cause du décès était due
à des menaces provenant de certaines de ses connaissances. Ceux qui
suivaient régulièrement les informations qui tournaient en boucle (une
grande partie de la population française) tenaient déjà pour coupables les
copines de Marjorie en se basant uniquement sur les récits de
l’évènement. Cependant, en ayant eu connaissance, par la suite, du rapport du
coroner, on
découvre tout à coup que l'information ou la «surinformation» donnée par les médias ne reflétait pas la réalité. En fait, la cause du suicide n'était pas strictement
liée à l'intimidation. Pourtant, à la suite de ce qui a été écrit dans
différents médias, une jeune fille et certains des amis de Marjorie ont dû subir
les accusations d’une frange de la population. Ils vivent encore
aujourd'hui avec le jugement que portent envers eux les gens.
C’est montrer à quel point la
surinformation sur un évènement donné peut conduire à une mauvaise lecture
des choses ou des faits. Elle ne concerne pas seulement les
médias occidentaux puisque en Afrique, particulièrement au Sénégal, le
phénomène y est assez fréquent. Avec un peu plus d’une dizaine de chaînes
nationales, chacune traite différemment un évènement donné. Les sénégalais
sont souvent "surinformés" et ne parviennent pas à bien interpréter
une information, surtout quand celle-ci vient de l’extérieur. Ce fut le cas
lors de la guerre
en Irak, quand les américains sont parvenus à convaincre l’opinion publique
internationale, la population sénégalaise y compris, sur la légitimité de cette guerre. Avec le flot d’informations
retransmises par nos chaînes sans réécriture, les sénégalais n’ont pas cherché
plus loin. Ils partageaient pour la plupart l’opinion de Bush grâce à ce qu’ils avaient comme information.
Lors des présidentielles
sénégalaises, les médias nationaux ont aussi bombardé la population avec
les images des émeutes, des violences policières et les discours parfois mal
interprétés du président Abdoulaye Wade. Au final, les sénégalais voyaient en ce président l’incarnation du mal plus qu’autre
chose. Ce qui a contraint beaucoup de gens à voter pour Macky Sall. Cela ressemblait plus à une sanction parce que selon certains médias, la
population devait choisir entre le mal et le moindre mal.
Idem dans l’affaire Cheikh
Yérim Seck, où les médias on beaucoup contribué à la diabolisation de la
personne. L'opinion publique a jugé coupable
ce journaliste avant même son procès. C’est montrer que la surinformation peut
parfois mener à la désinformation
ou à des prises de position.
La vitesse à laquelle évoluent les informations
empêche parfois d’en savoir beaucoup plus sur un fait, de maîtriser ou de bien
comprendre l’information qui est véhiculée. Et quand cela arrive, certaines
personnes ne peuvent pas se joindre à des débats ou être actives dans la vie
publique de peur d’entrer dans un domaine inconnu ou peu maîtrisé. Le rôle des
médias dans ce cas serait de rendre l’information plus « digeste » en
laissant aux gens le temps de bien
intégrer ce qu’il vienne d’apprendre pour enfin réagir par rapport aux
évènements.
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